3 Examen quant au fond des demandes de brevets

L’examen quant au fond a pour but de s’assurer que la demande et l’invention qui en fait l’objet satisfont aux conditions définies dans les dispositions de la loi sur les brevets.

La principale tâche de l’examinateur est de veiller au respect des conditions de fond.

Il est à noter que puisque la République de Djibouti n’est pas membre du traité de coopération en matière de brevet PCT, il y’aura deux types de demande de brevet qui seront traitées par la section brevet :

  • Premiers dépôts Djiboutiens de demandes de brevet :

Il s’agit de demandes de brevets déposées sans revendication d’un droit de priorité. Elles proviennent la plupart du temps des résidents mais elles peuvent provenir des non résidents. Dans le deuxième cas, il peut s’avérer que des déposants redéposent des demandes qui ont été déposées dans un autre office, voire même publiées, plus d’un an avant la date de dépôt à Djibouti.

Il peut donc arriver que l’invention objet de dépôt auprès de l’ODPIC ne soit pas nouvelle. A cet effet, l’agent chargé de l’examen examinera avec attention de telles demandes qui ne revendiquent pas un droit de priorité pourtant émanant des non résidents.

  • Deuxièmes dépôts Djiboutiens :

Ces demandes revendiquent un droit de priorité. Il convient de rappeler que le déposant est tenu de produire, dans les trois mois à compter du dépôt, une copie certifiée de la demande antérieure à peine de perdre son droit de priorité.

La perte du droit de priorité a une influence sur l’état de la technique à considérer.

3-1: L’objet de la demande est une invention non brevetable :

L’examinateur doit vérifier si l’objet de la demande constitue une invention brevetable au sens de l’article 26 de la loi sur les brevets. A cet effet, pour déterminer si l’objet d’une demande est ou non une invention brevetable, l’examinateur doit tenir compte que toute exclusion de la brevetabilité n’est applicable que dans la mesure où la demande concerne des éléments exclus en tant que tels.

  • Les découvertes, les substances, matières et organismes tels qu’ils existent dans la nature, ainsi que leurs parties ou éléments :

Le fait de trouver une substance auparavant non reconnue dans la nature ou une propriété nouvelle d’un matériau connu ou d’un objet connu ne constitue qu’une simple découverte et son objet n’est donc pas brevetable puisque la découverte en soi n’a aucun effet technique. Toutefois, si on peut démontrer que cette substance produit un effet technique ou que le matériau peut être utilisé à des fins pratiques cela constitue une invention qui peut être brevetable.

  • Les théories scientifiques et les méthodes mathématiques :

Pour les méthodes scientifiques, elles constituent un cas général de découverte qui n’a aucun effet technique et n’est donc pas brevetable.

Pour les méthodes mathématiques, se sont des méthodes purement abstraites ou théoriques qui ne sont pas brevetables.

  • Le corps humains et les matières qui composent le corps humain, aux différents stades de sa constitution et de son développement, ainsi que ses éléments, y compris la séquence ou la séquence partielle d’un gène.
  • Les procédés essentiellement biologiques d’obtention de végétaux ou d’animaux :

Un procédé d’obtention de végétaux ou d’animaux est essentiellement biologique s’il consiste intégralement en des phénomènes naturels et il n’est pas de ce fait brevetable.

  • Les œuvres littéraires et artistiques ou toute autre création esthétique :

Les œuvres littéraires et artistiques ainsi que les créations purement esthétiques ne constituent pas une destination de nature technique puisque l’effet esthétique proprement dit n’est pas brevetable et ne peut faire l’objet ni d’une revendication de produit ni d’une revendication de procédé. Toutefois, si cet objet présente des particularités d’ordre technique, il peut être brevetable.

  • Les plans, principes et méthodes dans l’exercice d’activités intellectuelles, en matière de jeu ou dans le domaine d’activités économiques :

Les plans, principes et méthodes dans l’exercice d’activités intellectuelles, en matière de jeu ou dans le domaine d’activités économiques sont dépourvues de caractère technique et ils ne peuvent pas être brevetables.

  • Les programmes d’ordinateurs :

Les programmes d’ordinateurs en tant que tels ne sont pas brevetables mais si la demande de brevet porte sur une invention comportant un programme d’ordinateur qui se présente comme une étape de fonctionnement de l’invention revendiquée, l’ensemble peut être brevetable.

  • Les présentations d’information :

La présentation d’informations définie uniquement par l’information qu’elle contient n’est pas brevetable. A contrario, contrairement au contenu de l’information, la façon de présenter une information peut constituer des caractéristiques techniques brevetables.

3-2 : L’objet de la demande est exclu de la brevetabilité :

L’examinateur doit vérifier si l’objet de la demande est exclu de la brevetabilité au sens de l’article 27 de la loi sur les brevets.

  • Les végétaux et les animaux autres que les micro-organismes
  • Les méthodes de diagnostique, thérapeutiques et chirurgicales pour le traitement des personnes ou des animaux :

Les méthodes de traitement thérapeutiques et chirurgicales du corps humain ou animal ainsi que les méthodes de diagnostic appliquées au corps humain ou animal ne sont pas considérées comme des inventions brevetables.

Par ailleurs, l’article 28 de la loi stipule que cette disposition ne s’applique pas aux produits, notamment aux substances ou compositions, pour la mise en œuvre d’une de ces méthodes.

Par conséquent, les instruments et appareillages chirurgicaux, thérapeutiques ou de diagnostics utilisés dans ces méthodes peuvent être brevetés.

  • Les inventions dont l’exploitation commerciale ou la mise en œuvre seraient contraire à l’ordre public ou bonnes mœurs, ou porteraient atteinte à la santé ou à la vie des personnes, des animaux, des végétaux ou à l’environnement.

3-3 : La nouveauté :

L’examinateur doit vérifier si l’invention est nouvelle au sens des articles 22 et 41 de la loi.

Conformément aux dispositions de l’article 23 de la loi, est nouvelle l’invention qui n’est pas comprise dans l’état de la technique. L’état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public en tout lieu dans le monde par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen, avant la date de dépôt de la demande de brevet à Djibouti ou de la date de priorité valablement revendiqué pour cette demande.

L’état de la technique comporte aussi le contenu de demandes de brevets déposées à une date antérieure et qui n’ont été publiées qu’à la date de dépôt de la demande à l’ODPIC ou à une date postérieure.

Cela signifie que :

  • La nouveauté est absolue en ce qui concerne l’étendue territorial puisque l’invention doit être nouvelle en tout lieu dans le monde;
  • La nouveauté est absolue en ce qui concerne les moyens de divulgation qui englobe aussi bien la description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen ;
  • La nouveauté concerne aussi bien l’information technique contenue dans les documents de brevets et celle continue dans les journaux, les ouvrages scientifiques et technologiques, internet et autres.

Il est à noter que l’article 24 de la loi a prévu un délai de grâce de 12 mois avant la date de dépôt à Djibouti. Ce délai de grâce permet à l’inventeur ayant divulgué, lui-même ou ses ayants droit, son invention lors d’une communication ou d’une publication de disposer de 12 mois pour protéger cette invention par un brevet sans en affecter la condition de nouveauté.

Le délai de grâce couvre de même les actes commis par un office de brevet qui aurait indûment publié la demande ou par un tiers ayant obtenu de l’inventeur des informations sur l’invention.

3-4 : L’inventivité :

Une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique. La question de savoir si l’invention implique une activité inventive ne se pose que s’il y a nouveauté.

Il est opportun de signaler que l’homme du métier s’entend d’un praticien du domaine technique concerné, qui dispose de connaissances et d’aptitudes moyennes et qui possède les connaissances générales dans le domaine concerné à une date donnée à savoir la date de dépôt de la demande ou la date de la priorité valablement revendiquée.

Le terme évident se réfère à ce qui découle manifestement et logiquement de l’état de la technique, c’est-à-dire à ce qui ne suppose pas une qualification ou une habileté plus poussées que celles qu’on est en droit d’attendre d’un homme du métier.

3-5 : L’application industrielle :

Est brevetable toute invention susceptible d’application industrielle.

Une invention est considérée comme susceptible d’application industrielle si son objet peut être fabriqué ou utilisé dans tous genre d’industrie y compris l’agriculture.

3-6: L’objet de l’invention :

L’examinateur doit vérifier si l’objet de l’invention porte sur des produits, sur des procédés et sur toute application nouvelle ou une combinaison de moyens connus pour arriver à un résultat inconnu par rapport à l’état de la technique.

3-7: L’intitulé de l’invention :

L’intitulé de l’invention doit caractériser l’objet de l’invention, il doit faire apparaître de manière claire et concise la désignation technique de l’invention et ne doit pas comporter des dénominations de fantaisie.

3-8: Manque de clarté et de suffisance de la description :

L’invention doit être exposée dans la demande de brevet de façon suffisamment claire et complète pour qu’un homme du métier puisse l’exécuter.

Les directives relatives au contenu de la description telles qu’expliquées au point 1-2-2-1 ont pour objectif de garantir que la demande de brevet comporte des informations techniques suffisantes pour qu’un homme du métier puisse exécuter l’invention telle que revendiquée, d’une part et d’autre part de permettre la compréhension de la contribution apportée à l’état de la technique par l’invention telle que revendiquée.

La description ne doit pas contenir de dessins ou de graphiques mais elle peut contenir des tableaux ou de formules chimiques ou mathématiques.

De même, il convient de ne pas utiliser des noms propres, marques et noms commerciaux ou des termes semblables pour désigner des matériaux ou des produits, dans la mesure où ces termes constituent simplement une indication d’origine et peuvent se rapporter à toute une gamme de produits différents.

3-9: Revendications :

La demande doit contenir une ou plusieurs revendications qui doivent être numérotées.

Les revendications doivent définir l’objet de la protection demandée, être claires et concises  et se fonder sur la description.

Etant donné que l’étendue de la protection conférée par le brevet est déterminée par la teneur des revendications, interprétées à l’aide de la description et des dessins, il est indispensable qu’elles soient claires.

L’exigence selon laquelle les revendications doivent être claires s’applique à chacune des revendications prises individuellement ainsi qu’aux revendications dans leur ensemble. La clarté des revendications est d’une extrême importance, étant donné qu’elles définissent l’objet pour lequel une protection est demandée.

Les revendications doivent être présentées telles que expliquées au point 1-2-2-1, et ne doivent pas contenir de dessins ou de graphiques mais elles peuvent contenir des tableaux ou de formules chimiques ou mathématiques.

3-10: L’unité de l’invention :

La demande de brevet ne peut concerner qu’une invention ou une pluralité d’inventions liées entre elles de telle sorte qu’elles ne forment qu’un seul concept inventif général, le lien entre les inventions doit être de nature technique. Dans le cas d’une pluralité d’inventions liées par un concept unique, la demande de brevet contiendra généralement plusieurs revendications indépendantes de la même catégorie.

3-11: Autres conditions : (article 37 de la loi)

La demande de brevet ne doit pas contenir :

  • Des éléments ou de dessins dont la publication ou la mise en œuvre serait contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs ;
  • Des déclarations dénigrantes concernant des produits ou procédés des tiers ou le mérite ou la validité de demandes de brevets ou de brevets des tiers. Les simples comparaisons avec l’état de la technique ne sont pas en elles mêmes considérées comme dénigrantes ;
  • Des éléments manifestement étrangers à la description de l’invention.

De même, la demande de brevet ne peut comporter ni restrictions ni conditions ni réserves.

3-12 : Les corrections apportées aux documents déposés :

En vertu de l’article 39 de la loi, le déposant peut en tout temps demander la rectification des fautes d’expression ou de transcription ainsi que des erreurs matérielles relevées dans les pièces et documents déposés.

Il est à signaler que contrairement aux dispositions de l’article 39 la possibilité de faire les corrections mentionnées ci-dessus ne doit être acceptée qu’avant la délivrance de brevet et surtout pas en tout temps.

L’examinateur doit vérifier si la demande de rectification s’impose à l’évidence.

A cet effet, toute rectification qui a pour conséquence d’étendre le contenu de la demande de brevet au-delà de la divulgation figurant dans la demande initiale doit être rejetée.

Les procédures concernant les corrections figurent au chapitre relatif aux inscriptions.

3-13 : La classification internationale des brevets CIB :

L’examinateur quant au fond doit procéder à la classification de l’invention selon la classification internationale des brevets CIB.

La classification recouvre l’ensemble des connaissances que l’on peut considérer comme relevant du domaine des brevets d’invention et se divise en huit sections. Les sections sont le niveau hiérarchique le plus élevé de la classification.

 Le titre de chaque section est suivi d’une récapitulation des titres de ses subdivisions principales. On trouve à l’intérieur des sections des titres indicatifs qui définissent des sous-sections et auxquelles n’est affecté aucun symbole de classement.

Chaque section se divise en plusieurs classes qui constituent le deuxième niveau hiérarchique de la CIB.

Chaque classe comprend une ou plusieurs sous-classes qui constituent le troisième niveau hiérarchique de la classification.

De même, chaque sous-classe se décompose en plusieurs subdivisions dénommées “groupes”, qui sont soit des groupes principaux constituant le quatrième niveau hiérarchique de la classification, soit des sous-groupes constituant des niveaux hiérarchiquement inférieurs dépendant d’un groupe principal de la classification.

Un symbole complet de classement se compose de l’ensemble des symboles affectés à la section, à la classe, à la sous-classe et au groupe principal ou au sous-groupe.

Exemple :

A                     01                    B                     33/00                           ou 33/08

Section            Classe              Sous-classe     Groupe principal         Sous-groupe

1er niveau        2ème niveau      3ème niveau      4ème niveau                 

Les offices de propriété industrielle sont tenus de classer leurs documents de brevet publiés au moins selon le niveau de base. Ce niveau a été créé à des fins d’information générale, par exemple, la diffusion de l’information, et à des fins de recherche dans des collections nationales de brevets plus restreintes. Il comprend uniquement les entrées hiérarchiquement supérieures de la classification, c’est-à-dire les sections, les classes, les sous-classes, les groupes principaux.

Si l’examinateur n’arrive pas à classifier l’invention, il peut consulter le site web de l’OMPI comme suit :

  • Soit il utilise le TACSY pour effectuer des recherches de la classification par mots clés: http://www.wipo.int/tacsy/
  • Soit il utilise IPCCAT accessible par la page CIB du site de l’OMPI. IPCCAT est un outil de classification automatisée basé sur une analyse statistique des mots présents dans un texte d’une certaine longueur comme une revendication ou un abrégé. https://www3.wipo.int/ipccat/

3-14 : Procédure d’examen quant au fond :

Si la demande ne satisfait pas à l’une des conditions citée ci-dessus, l’agent chargé de l’examen quant au fond des demandes de brevets doit inviter, par écrit, le déposant ou son mandataire à présenter des observations et d’apporter des modifications et corrections dans le délai de 3 mois à partir de la date de la notification de l’irrégularité (sachant que la loi ne précise pas à compter de quelle date ce délai doit courir).

Le délai de 3 mois peut être prorogeable sur demande justifiée du déposant.

Le formulaire relatif à la notification d’irrégularité suite à l’examen quant au fond est annexé. (Formulaire 6)

La sanction de l’absence de réponse à la notification d’irrégularité envoyée par l’ODPIC ou la non régularisation de la demande est le rejet de la demande. La décision de rejet doit être motivée et notifiée au déposant ou à son mandataire par lettre recommandée avec accusé de réception.

Le formulaire combiné relatif à la décision de rejet est annexé. (Formulaire 5)

En étudiant la réponse du déposant, l’agent chargé de l’examen quant au fond devra considérer avec beaucoup d’attention si l’objection est réellement levée. Dans ce cas et à l’issue de l’examen quant au fond, le dossier est transmis à la publication.

3-15 : Schéma graphique de l’examen quant au fond des demandes de brevets :